Dr Jean-Claude EMPERAIRE

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A QUOI SERT LA COURBE DE TEMPERATURE ?

courbe de temperatureLa courbe de température, ou courbe thermique, est le relevé quotidien de la température du corps. Elle est utilisée par la femme qui souhaite savoir si elle ovule et quand.

Pour être en mesure de de fournir ce renseignement, la température corporelle doit être mesurée avec une certaine rigueur : elle doit être prise le matin, au réveil, ce quelle que soit l’heure, avant toute autre activité, notamment avant de se lever ; chez les travailleuses de nuit, elle doit être prise au moment du réveil définitif. La méthode de mesure est par contre indifférente : les voies rectale, orale, axillaire ou auriculaire ont la même précision, car il s’agit surtout d’une mesure comparative ; par contre, cette méthode doit rester la même tout au long du même cycle. La valeur mesurée doit être reportée tous les matins sur un graphique mensuel lisible et facilement disponible, notamment en pharmacie ou sur internet.

 

Le principe de la courbe de température

La température corporelle, en l’absence de phénomènes inflammatoires ou infectieux, reste relativement stable, avec quelques oscillations d’un jour à l’autre, au cours de la première partie du cycle menstruel. Au milieu du cycle, l’ovulation déclenche la sécrétion de progestérone par le corps jaune, formé à partir du follicule qui vient d’ovuler ; un des produits de dégradation de l’hormone agit sur les centres nerveux de la thermogénèse et déclenche une hausse de température de quelques dixièmes de degrés, qui dure jusqu’aux règles en réalisant le plateau thermique : la courbe normale est donc biphasique. La température revient alors à sa valeur de base en cas de règles car la sécrétion de progestérone disparaît, et un nouveau cycle recommence ; en cas de début de grossesse, au contraire, la sécrétion de progestérone est maintenue, et la température va rester élevée en même temps que se constitue le « retard » de règles (G).

 

Comment interpréter une courbe de température chez la femme ?

L’interprétation de la courbe thermique est relativement simple, d’où son intérêt : typiquement l’ovulation est marquée par une légère baisse le jour de l’ovulation, suivie dès le lendemain d’une montée rapide de 3 à 4 dixièmes de degrés qui se maintient pendant 12 à 14 jours avant de baisser au moment de l’arrivée des règles (A).

En pratique, l’interprétation de la courbe n’est pas toujours aussi évidente :

  • Les oscillations d’un jour à l’autre peuvent être relativement importantes, gênant la détermination du moment de l’ovulation ; il arrive même que la courbe soit ininterprétable, alors même qu’elle parfaitement effectuée, et ce en dehors de tout désordre ovulatoire ;
  • La baisse ovulatoire de la courbe n’est pas automatique, et on doit alors considérer à posteriori le jour de l’ovulation comme étant le dernier précédant le décalage thermique ;
  • Même en cas de cycles réguliers, le jour de l’ovulation peut varier de quelques jours d’un cycle à l’autre : mieux vaut établir cette courbe sur 3 à 4 cycles pour avoir une idée plus globale. Par contre, en dehors de cas particuliers, prolonger ces mesures fastidieuses au-delà de quelques cycles ne revêt rigoureusement aucun intérêt car n’apporte plus rien sur le plan pratique ;

 

Utilisation de la courbe de température

 

Ce qu’une courbe thermique interprétable peut apporter :

  • Chez les femmes douées de cycles réguliers, principalement le fait de savoir si un cycle est ovulatoire ou non ;
  • Chez les femmes présentant des cycles irréguliers, la courbe confirme que les variations de longueur du cycle s’effectuent exclusivement aux dépends de la phase pré-ovulatoire : la phase post-ovulatoire, au contraire, a une durée remarquablement fixe de 12 à 15 jours (C et D) ;
  • Chez les femmes affectées de cycles anarchiques, la courbe permet de distinguer les vraies règles, précédées d’un plateau thermique, des saignements anormaux qui, eux, ne sont pas consécutifs à un décalage thermique (E et F) ;

Les limites de la courbe thermique

 

Ce qu’une courbe thermique interprétable ne peut pas apporter :

  • Elle ne permet pas de prévoir l’ovulation, puisque la montée de température ne devient détectable qu’un à deux jours plus tard : si une femme peut reconnaitre son jour d’ovulation à posteriori, elle ne peut pas au contraire savoir en tenant sa courbe si l’ovulation aura lieu demain ou plus tard. Tout dépend de l’utilisation que l’on souhaite faire de cette courbe, mais dans tous les cas mieux vaut se rappeler que si les spermatozoïdes sont susceptibles de rester fécondants pendant plusieurs jours dans l’appareil génital féminin, l’ovule est au contraire beaucoup plus fragile et doit être fécondé dans les heures qui suivent son émission. Il s’ensuit :
    • Qu’en cas de désir de grossesse, les rapports doivent avoir lieu avant le décalage thermique ;
    • Qu’en cas de souhait contraceptif au contraire, les rapports non protégés peuvent être repris après un décalage thermique franc, après avoir été évités pendant la presque totalité de la période qui s’étend entre la fin des règles et la montée de température.
  • Elle peut assurer que l’ovulation a lieu, mais elle ne peut en aucun cas préjuger de la qualité de celle-ci sur son simple aspect :
    • Il suffit d’un taux sanguin de progestérone de 3 ng/ml pour faire décaler la température, alors qu’à la suite d’une ovulation de bonne qualité ce taux doit atteindre au moins 10 ng/ml ;
    • La baisse de température le jour de l’ovulation et très inconstante ;
    • Le caractère préférable d’un décalage franc par rapport à une montée thermique qui s’étale sur plusieurs jours n’est que très relatif (A et B) ;
    • Par contre, un plateau thermique court inférieur à 12 jours peut marquer un corps jaune insuffisant secondaire à une ovulation défectueuse ;

 

En résumé, la courbe de température est un examen simple, précieux mais relativement grossier, auquel on ne peut pas trop demander, ni surtout essayer de lui faire dire ce qu’elle est incapable d’objectiver. On peut retrouver ci-dessous quelques exemples de courbes thermiques.

Attention : comme la progestérone naturelle, les progestérones de synthèse (progestatifs) font décaler la courbe thermique. Elle est donc inutilisable en cas de traitement par ces hormones, seules ou sous forme d’estroprogestatifs comme la pilule contraceptive. Une seule exception : le Duphaston  n’a pas d’action centrale et peut donc être utilisé concomitamment à l’établissement d’une courbe thermique.

 

Graphique courbe de temperature

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