Revue scientifique

ARRETONS DE DOSER L’AMH

Analyse de la parution médicale « IDo not measure AMH to predict women’s fecundity » 

  • Auteurs : DE ZIEGLER D et Coll.  
  • Support : Fertil Steril 2025

L’hormone anti Müllerienne (AMH) est secrétée par le pool des petits follicules qui se développent à la fin du cycle et au tout début du cycle suivant, et dont un seul parviendra jusqu’à l’ovulation. Son dosage n’a qu’un seul intérêt : il réfléchit le nombre de follicules ovariens susceptibles de répondre à une stimulation par les  gonadotrophines, et rien d’autre.

Ceci est particulièrement important dans le cas de la stimulation intense pour fécondation in vitro (FIV) : le taux d’AMH est un paramètre important dans le choix de la dose de départ, de façon à ce que le nombre d’ovocytes en croissance ne soit ni exagéré, ni au contraire insuffisant. Le décompte de ces petits follicules visibles à l’échographie en début de cycle, ou compte folliculaire antral (CFA), généralement corrélé au taux d’AMH, donne d’ailleurs le même renseignement. 

Malheureusement, ce dosage a changé peu à peu de signification, pour finir par faire proposer des décisions potentiellement inappropriées à des couples infertiles … ou pas.     

LA RESERVE OVARIENNE                                                                                                             

Cette possibilité de prédire le nombre de follicules pouvant répondre à la stimulation ovarienne a introduit le concept de réserve ovarienne (RO). On admet que le nombre de petits follicules disponibles à la stimulation ovarienne par les gonadotrophines en début de cycle est fonction de la quantité totale d’ovocytes contenus dans les deux ovaires : plus ce stock ovocytaire est important, plus le nombre de ces petits follicules disponibles est important, et plus le taux d’AMH est élevé.

Par contre, ce concept de RO ne prend pas en compte l’autre paramètre fondamental de la fécondité féminine : la qualité ovocytaire.

Taux d’AMH et CFA diminuant avec l’âge, comme la fécondité féminine, il a été conclu par erreur que ces deux paramètres mesuraient la fécondité féminine elle-même. Or si qualité et quantité ovocytaire diminuent effectivement avec le temps, ces deux paramètres ne sont pas liés entre eux : certaines jeunes femmes peuvent avoir une quantité d’ovocytes relativement faible mais doués d’une excellente qualité grâce à leur jeune âge ; l’inverse est également vrai : certaines femmes sont susceptibles de conserver une quantité importante d’ovocytes après 40 ans, mais dont la qualité aura significativement décliné.

RESERVE OVARIENNE ET FECONDITE FEMININE

Ces notions ayant progressivement été insuffisamment prises en compte, il a finalement été admis que la RO pouvait mesurer la fécondité féminine. Sur la base de cette assertion inexacte, on a pu recommander de doser l’AMH chez les jeunes femmes dans le but de déterminer leurs chances futures de grossesse naturelle, et de prédire l’âge de déclin de leur fertilité. 

Cette conclusion est en fait fondamentalement incorrecte. Plusieurs études importantes ont en effet montré que le délai mis pour devenir enceinte naturellement après l’arrêt de toute contraception, appelé temps d’exposition, était le même quel que soit le taux d’AMH. Cela signifie que les chances de grossesse et le temps mis pour devenir enceinte sont les mêmes chez les femmes dont le taux d’AMH est faible, et chez les femmes dont le taux d’AMH est élevé. Des grossesses ont même été observées chez des femmes dont l’AMH était indosable, et qui avaient été ainsi abusivement orientées vers le don d’ovocyte. Un taux faible d‘AMH est surtout susceptible de faire orienter des couples qui n’en ont nullement besoin vers une fécondation in vitro « avant qu’il ne soit trop tard ». 

Au point que de plus en plus de Sociétés Savantes, notamment aux USA et en Grande Bretagne, préconisent de ne plus doser l’AMH chez les femmes asymptomatiques et sans problème de fertilité, ce dosage étant incapable de prévoir leurs chances naturelles de grossesse.

En conclusion, le dosage en routine de l’AMH doit être découragé. Il est susceptible d’être la source de stress inutile, et surtout de décisions thérapeutiques inappropriées.