Exploration des trompes utérines
L’exploration de la perméabilité des trompes utérines est l’un des examens essentiels du bilan de fertilité du couple. Elle s’apprécie en effectuant un examen radiologique appelé hystéro-salpingo-graphie : il consiste à remplir l’utérus par le col avec un liquide de contraste qui va mouler les parois utérines, puis fuir dans la cavité abdomino-pelvienne par les deux trompes. Cet examen va ainsi permettre de dépister des anomalies de la cavité utérine : une malformation, un polype ou un accolement des parois utérines (synéchie) ; ainsi que des anomalies de perméabilité tubaire : au lieu de cheminer librement dans les trompes, le liquide de contraste reste bloqué à l’extrémité de la trompe (hydrosalpinx) ou sur son trajet. Il peut aussi ne pas pouvoir pénétrer dans l’une des trompes ou les deux : on parle d’obstruction tubaire proximale uni- ou bilatérale. Cette constatation a des conséquences précises : la rencontre de l’ovocyte et des spermatozoïdes ne se fait pas normalement. Ceci peut expliquer ou au moins entrer en ligne de compte dans l’explication de l’infertilité du couple.
Obstruction des trompes
En cas d’obstruction unilatérale, la rencontre peut se faire dans l’autre trompe, à condition que l’ovulation se fasse sur l’ovaire du même côté. Lorsque l’ovulation se produit sur l’ovaire du côté de la trompe bouchée, l’ovocyte peut quand même être recueilli par l’autre trompe, grâce à des courants liquidiens intra-pelviens : cette possibilité reste aléatoire, ce qui diminue sensiblement les chances de grossesse sans toutefois les supprimer. Le problème est qu’une trompe ne se bouche pas toute seule : elle a généralement été abimée par un processus infectieux (salpingite) souvent passé inaperçu ; celui-ci a pu laisser d’autres séquelles pelviennes, comme des adhérences : il s’agit de voiles séparant les différents organes. Ceux-ci compromettent le cheminement de l’ovocyte vers la trompe, même du bon côté, et sont invisibles à la radio. Il est donc nécessaire dans ce cas de s’assurer du bon fonctionnement de la trompe indemne en réalisant une caelioscopie, examen invasif sous anesthésie générale.
En cas d’obstruction tubaire bilatérale, la situation est encore plus simple : il est nécessaire d’avoir recours à la fécondation in vitro (FIV) : elle organise au laboratoire entre l’ovocyte et les spermatozoïdes la rencontre qui ne peut plus avoir lieu dans les trompes. L’essor de la FIV a en effet pratiquement fait disparaître la chirurgie réparatrice des trompes : auparavant, et dans des mains expertes, la réparation de la trompe proximale permettait quand même 50 à 70 % de grossesses au bout de 2 ans de suivi, et ce sans traitement supplémentaire.
Diagnostic d’obstruction des trompes
Il s’ensuit que le diagnostic d’obstruction tubaire proximale doit être posé avec toute la certitude nécessaire : elle oriente en effet vers des procédures relativement lourdes et invasives, caelioscope ou FIV. Or il se trouve que l’hystérographie peut être prise en défaut, et donner de faux négatifs : le liquide de contraste ne passe pas dans la trompe, mais celle-ci n’est pas réellement bouchée. Un spasme de la trompe peut se produire en cours d’examen ; ou la trompe est simplement encombrée de sécrétions gênant le passage du liquide; ou encore la pression du liquide est insuffisante du fait de problèmes d’étanchéité. C’est pourquoi il est nécessaire avant d’envisager des explorations plus lourdes de pratiquer un examen supplémentaire : une salpingographie sélective suivie ou non de cathétérisme tubaire.
Salpingographie sélective
Cet examen consiste à introduire par le col utérin un cathéter très fin et de le placer au niveau de l’orifice de la trompe ; on injecte ainsi le liquide de contraste directement dans la trompe ; si l’obstacle se confirme, il est possible de tenter une désobstruction en poussant doucement le cathéter dans la trompe (Figure 1). Cette manœuvre est indolore, et cet examen est paradoxalement moins désagréable que l’hystérosalpingographie classique.
L’expérience montre que la ou les trompes apparemment bouchées ne le sont pas dans la majorité des cas. Nos résultats, qui constituent la plus grande série publiée à ce jour, confirment ceux d’autres études : en des mains expertes, la salpingographie sélective rétablit une perméabilité tubaire bilatérale chez 75% et unilatérale chez 87,5% des femmes ayant les deux trompes bouchées ; et une perméabilité bilatérale chez 88% de celles qui montraient une obstruction unilatérale (1). Cette procédure est également thérapeutique : une méta-analyse récente a établi qu’une grossesse s’installe spontanément chez 22,3% des femmes dans les 6 mois et 26,4% dans l’année qui suit l’examen.
Ces résultats confirment qu’une femme ne devrait jamais être orientée vers une caelioscopie ou une FIV pour obstruction tubaire sans avoir pris la précaution de réaliser une salpingographie sélective. Seul inconvénient de la procédure : le nombre de radiologues en ayant l’expérience est encore relativement restreint.
Figure 1-Salpingographie sélective.
En haut à gauche, l’image hystérographique d’une obstruction tubaire proximale bilatérale. Puis, dans le sens des flèches, cathétérisme sélectif et désobstruction successivement de la trompe gauche, puis de la trompe droite. A la fin de l’examen, le liquide de contraste passe dans les deux trompes, qui étaient en réalité parfaitement perméables.
Référence
1-Billet P, Emperaire JC. Place de la salpingographie sélective et du cathétérisme tubaire dans le bilan du couple infertile. Med The Reprod 2018,